Vous savez probablement que Feldenkrais est un outil formidable pour améliorer l’aisance corporelle, mais ici nous allons passer en revue un certain nombre de questions qui se posent aux personnes qui travaillent avec leur corps de manière intensive.
Tout est corporel
Pour situer les choses, rappelons que toutes nos actions passent par notre corps : que ce soit le musicien, le maçon, la secrétaire ou le comédien, tout ce qui a une action sur le monde est passé par nos mains, nos pieds, notre peau, nos sens, nos muscles, etc. Par conséquent, pour que l’action soit satisfaisante, on peut poser la question suivante : « Comment faire pour que notre intention soit harmonieusement liée avec notre action ? »
L’inverse serait de décider dans sa tête qu’il faudrait pouvoir faire comme-ci ou comme-ça, sans vérifier sincèrement si c’est possible, facile, agréable… (vous reconnaîtrez ici l’échelle de Feldenkrais).
A l’impossible nul n’est tenu
Une fois ceci posé, on peut commencer par repérer où l’on essaie de faire l’impossible. En effet, même si notre organisme est formidable, on ne peut pas soulever 100 kg à bout de bras et on ne peut pas promener 10 tonnes par jour sans assistance. Parfois, quelque chose en nous se déconnecte et on essaie de faire des choses impossibles, ou bien pas souhaitables pour notre santé.
Si on se laisse emmener sur cette pente, c’est le corps qui dira stop, la douleur nous permettant de sentir que quelque chose doit être réajusté.
Feignant intelligent
Que ce soit après une blessure, ou bien avant, nous préconisons d’aller vers l’efficacité et d’être économe. Ne nous y trompons pas, nous encourageons à réussir des choses exceptionnelles, mais contrairement à ceux qui aiment serrer les dents en criant « No Pain, No Gain » (pas d’amélioration sans douleur), nous cherchons l’aisance dans l’action.
Est-il autorisé de réussir à faire ce que l’on souhaite alors qu’on a gardé le sourire ? Nous posons la question ainsi car il semble que l’on récompense plus facilement quelqu’un qui peine que quelqu’un qui reste détendu et semble ne faire aucun effort. « Fais un effort ! » est une phrase que les gens se répètent comme on propage un rhume…
Alors nous proposons de rejoindre le club des feignants intelligents. Les autres diront que nous sommes feignants, nous dirons que nous sommes intelligents et les faits seront de notre côté car le travail accompli sera à la hauteur de la qualité dans nos gestes et leur enchaînement.
Le témoignage d’un tailleur de pierre
Nous ne prétendons pas faire le tour de l’ergonomie en quelques lignes, mais nous serions heureux de vous encourager à méditer sur ce thème. Pour être concret, nous sommes allés à la rencontre d’Eric Marandel, tailleur de pierre depuis 30 ans. On devine que la pierre est un maître implacable : si on n’y prend garde, le corps s’épuisera bien avant elle. Or nous avons rencontré quelqu’un qui a quelques difficultés, mais très modestes au regard du travail qu’il a accompli et des tonnes de pierres qu’il a taillées et placées.
Vous verrez dans cette vidéo quelques ingrédients très importants pour travailler longtemps en bonne santé :
- quand ce n’est pas nécessaire, il ne soulève rien. Nous avons été admiratifs de sa façon de sentir la pierre en la faisant basculer sur une arête, là où nous aurions été tentés de la soulever « pour voir » ;
- vous pourrez aussi admirer sa légèreté dans ses déplacements et dans le maniement de ses outils.
Pour le reste, laissons-lui la parole (vidéo de 4’37) :
Que faire, maintenant ?
C’est l’heure de prêcher pour sa paroisse : il y a de nombreuses options pour améliorer ses habitudes, mais Feldenkrais est une merveille dans ce domaine. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’on y apprend à prendre conscience de ce que l’on fait, comment on fait, comment on pourrait faire autrement…
Ainsi, on peut travailler dans deux directions pour améliorer son aisance :
- Poser de bonnes bases quant aux gestes que l’on va faire, aux outils que l’on utilise, à l’arrangement de ses actions : d’une certaine façon, ceci est l’environnement de l’action. On trouvera une réflexion sur ces thèmes dans toute bonne formation en ergonomie.
- D’autre part, nous avons tout à gagner à prendre conscience de notre confort et naviguer parmi la foule de façons différentes de faire, pour choisir ce qui est léger et nous renforce : ici, c’est de nous qu’il s’agit, de notre façon de coordonner nos muscles, des plus gros aux plus petits.
Là où Feldenkrais et les pratiques cousines vont se distinguer, c’est dans la façon d’amener des gestes plus efficaces : au lieu de « donner la solution » de l’extérieur, on va stimuler nos capacités naturelles de sentir et d’ajuster nos mouvements. C’est ce qui nous a permis d’apprendre à marcher, à faire du vélo, à nager, à chanter, etc. Personne ne nous a dit les détails, c’est nous qui avons trouvé en essayant.
Alors l’aventure commence ici : pour les gestes que vous faites souvent, essayez deux ou trois façons différentes et vous commencerez à voir réapparaître quelques options… et quelques autres… et encore d’autres. En suivant ce fil, plus vous essayez gentiment, doucement, plus votre cerveau pourra se nourrir de ces nouveaux chemins. L’appétit venant, sonnez à la porte du praticien Feldenkrais le plus proche de chez vous (voici un annuaire pour vous aider à le/la trouver) et vous voilà en route pour un très beau voyage !